Archive for août, 2014

Tricheurs

TricheursIls tournent lentement autour de la table au tapis vert, observent les trente-six numéros, se grisent du petit bruit de la boule rebondissant sur la roulette, des phrases rituelles des croupiers, de l’atmosphère envoûtante de la salle de jeux… Les joueurs sont ainsi, comme le fameux héros de Dostoïevski, attirés par le casino comme le papillon par la flamme. Les plus «mordus», ceux qui sacrifieraient tout pour continuer à jouer, n’ont qu’un moyen de satisfaire leur passion dévorante : la tricherie. Ce sont eux que Barbet Schroeder a voulu nous montrer en adaptant pour l’écran les souvenirs d’un véritable tricheur, qui expose ses trucs et analyse l’état d’esprit de ses semblables. Le film est tourné dans le casino ultramoderne de l’île de Madère. Jacques Dutronc y incarne un joueur invétéré qui s’attache à Suzie (Bulle Ogier) dont il s’imagine qu’elle lui porte chance, puis qui rencontre un tricheur professionnel, lequel lui propose d’entrer dans une association. Uni par la même passion, la même maladie du jeu, ce couple ira jusqu’au bout de sa folie. On s’étonne parfois que les stratagèmes de la tricherie semblent aussi grossiers. Et pourtant, tout est ici authentique. Refusant tout éclat spectaculaire, le film de Barbet Shroeder nous envahit insensiblement et continue en suite de nous hanter. Ce n’est pas si courant.

WoyzeckWoyzeck

C’est un petit soldat, Woyzeck. Brimé par ses chefs, moqué par ses compagnons. Petit soldat d’une petite ville de garnison vers 1850 et qui a pour simple raison de vivre d’assurer le bonheur de sa compagne Marie (Eva Mattes) et de leur enfant illégitime. Mais Marie va tomber dans les bras d’un fringant tambour-major et la garnison va se faire un plaisir de l’apprendre à Woyzeck qui va sombrer dans une folie meurtrière. «Woyzeck» est la dernière pièce de théâtre du grand dramaturge Georg Büchner. Elle a été interdite par les nazis durant la Seconde Guerre mondiale. Portée à l’écran par Werner Herzog, cela donne un film inquiétant, lourd, pesant et glacial. Un film terrible et dur, sublimement interprété par un Klaus Kinski au paroxysme de sa folie d’acteur génial.

dimanche, août 24th, 2014 Mes sujets chauds Pas de commentaire

La grande combine

La grande combineEn filmant un match, le cameraman Harry Hinkle (J. Lemmon) est involontairement bousculé par un des joueurs, un Noir colossal de 120 kg, surnommé Boom-Boom Jackson. Harry se retrouve à l’hôpital avec quelques contusions, mais son avocat survient pour lui expliquer la «grande combine» qui lui permettrait de toucher le gros paquet en se tournant les pouces il suffirait de simuler la paralysie et d’exiger des assurances un million de dollars d’indemnité. Harry accepte en rechignant un peu, espérant que cette fortune fera revenir sa femme qui l’a quitté pour un musicien. Mais c’est compter sans le facteur humain Boom-Boom est un brave homme, sa carrière est brisée si Harry continue de marcher dans l’escroquerie. La comédie devient de plus en plus amère : commencée sous les auspices d’un savoureux numéro de Walter Matthau en avocat marron, elle se poursuit en drame humaniste grinçant. La maîtrise de Billy Wilder consiste justement à nous faire passer subtilement de l’un à l’autre.

Missing

L’action est au Chili, en septembre 1973. Ceci n’est pas précisé dans le film, mais qui pourrait l’ignorer ? De jeunes Américains idéalistes vivent là-bas, comme bien d’autres aux quatre coins du monde, enthousiastes et candides. L’un d’eux, à la veille du putsch de Pinochet, est témoin de faits insolites. Il disparaît, probablement arrêté. Sa femme (Sissy Spacek) assiège l’ambassade, tandis qu’à Washington son père Jack (J. Lemmon) intervient en vain, puis prend l’avion pour Santiago. Au-delà de la dénonciation du crime, le vrai – sujet de «Missing» est là : c’est l’itinéraire de cet homme d’affaires, citoyen modèle, de bonne foi, confiant dans le gouvernement de son pays, qui va s’apercevoir peu à peu qu’il a été trompé, que les États-Unis se sont rendus complices de véritables atrocités. Son drame de conscience prend la forme d’une prise de conscience qui sera longue, lente, douloureuse, mais décisive. Présenté avec succès au Festival de Cannes 1982 (il y a décroché la Palme d’or), «Missing» a eu un énorme retentissement aux États-Unis. Il a taillé ainsi une brèche dans cette carapace de bonne conscience qui a permis de couvrir bien des crimes… Grâce à l’interprétation poignante de Jack Lemmon et de Sissy Spacek, «Missing» a réussi à remuer dans ses profondeurs la conscience du peuple américain, sans discours théorique, mais par le biais des sentiments et de l’émotion.

vendredi, août 8th, 2014 Mes sujets chauds Pas de commentaire